Le Royaume-Uni adopte les volants d’inertie pour sécuriser le réseau électrique

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Le Royaume-Uni adopte les volants d'inertie pour sécuriser le réseau
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Le Royaume-Uni accélère le déploiement de volants d’inertie pour stabiliser son réseau électrique, menacé par l’essor des énergies renouvelables. Ces dispositifs rotatifs, inspirés de technologies anciennes, fournissent une inertie synthétique sans émissions de carbone, contrastant avec les centrales fossiles traditionnelles. Alors que des pannes massives ont déjà frappé en 2019 et 2023, cette innovation s’impose comme un pilier de la décarbonation.


À retenir

  • Les énergies renouvelables comme l’éolien et le solaire réduisent l’inertie naturelle du réseau électrique, augmentant les risques de fluctuations.
  • Un incident en 2019 au Royaume-Uni a causé une chute de fréquence à 48,88 Hz, entraînant une panne partielle.
  • Le projet Greener Grid Park de Statkraft à Liverpool opère deux volants de 40 tonnes depuis 2023, couvrant 1 % de l’inertie du réseau britannique.
  • Au moins 11 projets de stabilisation sont actifs au Royaume-Uni en 2023, avec d’autres en cours.
  • L’objectif est d’atteindre 95 % d’énergie propre d’ici 2030 et une décarbonation complète dans la décennie suivante.
  • Le Royaume-Uni et l’Irlande mènent en Europe pour ces technologies face à une demande croissante en voitures électriques et pompes à chaleur.

Dans un contexte où la transition énergétique européenne s’accélère, la stabilité des réseaux électriques émerge comme un enjeu majeur pour intégrer massivement les énergies renouvelables. Cet article explore comment le Royaume-Uni, pionnier en la matière, recourt à l’inertie synthétique via des volants d’inertie pour sécuriser sa grille, tout en soulignant les leçons pour le continent. Pour les acteurs de la décarbonation – opérateurs, ingénieurs et décideurs publics – cette approche pragmatique offre des clés pour anticiper les instabilités futures, alors que la demande électrique explose avec l’électrification des transports et du chauffage.

Le défi croissant de la stabilité face à la décarbonation

Le passage accéléré aux énergies renouvelables bouleverse les fondements physiques des réseaux électriques, obligeant les opérateurs à repenser la régulation de fréquence.

L’enjeu critique de l’inertie du réseau

Les centrales électriques traditionnelles aux combustibles fossiles, avec leurs grandes turbines rotatives, fournissaient une inertie naturelle qui amortissait les fluctuations soudaines de l’offre et de la demande. À l’inverse, l’éolien et le solaire, sources intermittentes, ne génèrent pas cette inertie, rendant le réseau plus sujet aux variations de fréquence autour de 50 hertz. Le National Energy System Operator (NESO), chargé de la gestion au Royaume-Uni, identifie cette perte comme le principal risque pour la stabilité du réseau.

En 2019, une pannes massives a illustré ces vulnérabilités : une chute de fréquence à 48,88 hertz a plongé des régions entières dans l’obscurité, affectant des millions d’usagers. Cet événement a révélé comment l’absence de systèmes rotatifs expose le réseau à des oscillations rapides. Depuis, le NESO a initié des contrats pour des solutions alternatives, visant à maintenir une régulation de fréquence fiable malgré l’essor des ENR.

Historique des incidents et objectifs ambitieux

Plus récemment, en avril 2023, une mégapanne a frappé l’Espagne et le Portugal, où un réseau à forte teneur en ENR n’a pas géré une surtension subite, provoquant des oscillations incontrôlées de tension. Cet incident, survenu au printemps, a mis en lumière les limites des grilles continentales européennes face à la variabilité des renouvelables. Au Royaume-Uni, ces événements passés accélèrent les efforts pour une décarbonation totale.

L’objectif affiché est clair : 95 pour cent d’énergie propre d’ici 2030, et une élimination complète des combustibles fossiles dans la décennie suivante. Ces cibles imposent une refonte profonde, avec une emphase sur la stabilité du réseau pour éviter de nouvelles crises. Des experts comme David Brayshaw soulignent que sans inertie adéquate, les ambitions climatiques risquent de compromettre la fiabilité quotidienne de l’électricité.

Les volants d’inertie, une solution innovante et éprouvée

Face à ces défis, les volants d’inertie émergent comme une technologie mature, adaptée aux besoins modernes de l’inertie synthétique, déployée avec succès par des acteurs comme Statkraft.

Principe technologique et applications contemporaines

Un volant d’inertie, utilisé depuis des siècles dans des contextes comme la roue de potier ou la machine à vapeur, consiste en un rotor massif qui stocke de l’énergie cinétique. Dans les réseaux électriques, il réagit instantanément aux déséquilibres, mimant l’effet des turbines fossiles sans consommer de carburant. Associé à des compensateurs synchrones, il crée une inertie synthétique qui lisse les fluctuations de fréquence.

Le projet emblématique, Greener Grid Park à Liverpool, illustre cette application. Opérationnel depuis 2023, il intègre deux volants de 40 tonnes chacun, fournissant environ 1 pour cent de l’inertie totale pour l’Angleterre, l’Écosse et le Pays de Galles. Guy Nicholson, de Statkraft, explique que ces systèmes opèrent

sans brûler de combustibles fossiles, sans créer d’émissions de carbone

selon une déclaration récente. Cette approche renforce la durabilité en évitant les rejets de CO2 liés aux centrales de secours.

Volants d'inertie pour la stabilité du réseau britannique

Exemples d’installations et impact chiffré

Au total, au moins 11 projets de volants d’inertie et compensateurs synchrones étaient opérationnels au Royaume-Uni en 2023, avec d’autres en phase de contractualisation par le NESO. Ces installations, dispersées à travers le pays, contribuent à une résilience accrue contre les pics de demande. Par exemple, elles aident à gérer l’intégration croissante des voitures électriques et des pompes à chaleur, qui accentuent les pointes de consommation.

Les centres de données, de plus en plus énergivores, ajoutent à ces pressions, rendant l’inertie synthétique indispensable. Keith Pullen, professeur à l’Université de Londres, note que ces dispositifs surpassent les batteries lithium-ion en termes de rentabilité à long terme pour cette fonction spécifique. Leur durée de vie étendue et leur faible maintenance en font une option pragmatique pour la transition.

Avantages et limites dans un contexte européen

Bien que prometteurs, les volants d’inertie soulèvent des débats sur leur scalabilité, mais leur compétitivité économique les positionne comme un atout pour l’Europe.

Supériorité économique face aux batteries

Comparés aux batteries lithium-ion, les volants en acier offrent un coût-efficacité supérieur pour la fourniture d’inertie, avec une durabilité qui excède souvent les 30 ans. Ils évitent les coûts récurrents de remplacement des cellules lithium-ion, tout en gérant efficacement les réponses rapides aux fluctuations. Keith Pullen argue que cette technologie est

plus cost-effective et durable à long terme

pour stabiliser les réseaux riches en ENR.

Cette avantage s’étend à la sobriété énergétique : les volants n’exigent pas de ressources rares, contrairement aux batteries, favorisant une transition plus accessible. Dans un marché européen en pleine électrification, ils soutiennent l’efficacité sans compromettre la sécurité d’approvisionnement.

Leadership britannique et signaux d’alarme continentaux

Le Royaume-Uni et l’Irlande devancent le continent en adoptant ces solutions, avec des déploiements rapides post-incidents. L’événement espagnol de 2023 sert d’avertissement, poussant potentiellement l’Europe à accélérer ses investissements. Cependant, un contrepoint émerge : malgré les avancées, le rythme reste insuffisant pour les objectifs ambitieux.

Guy Nicholson alerte sur cet écart, déclarant que

pour le moment, nous ne pouvons même pas le faire pendant une heure

visant l’objectif de 95 pour cent d’énergie propre. Le NESO contractualise plus de projets, mais les experts plaident pour une accélération afin de contrer la demande spikier due aux usages émergents. Ce leadership britannique pourrait inspirer la France et ses voisins, où les réseaux interconnectés exigent une harmonisation des technologies de stabilisation.

En fin de compte, les volants d’inertie incarnent un pragmatisme technique qui pourrait ancrer la décarbonation européenne, à condition d’une mise en œuvre plus résolue.

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