Energie solaire concentré une alternative stratégique face aux batteries lithium-ion

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Le stockage d’énergie est un enjeu clé pour la transition énergétique, et l’énergie solaire concentrée (CSP) apparaît comme une solution compétitive face aux batteries, notamment en matière de coûts. Cependant, pour devenir une option de marché viable, la filière CSP doit surmonter plusieurs défis techniques et économiques, et les normes internationales jouent un rôle crucial dans cette évolution.

Qu’est-ce que l’énergie solaire concentrée (CSP) ?

La technologie de l’énergie solaire concentrée (CSP) repose sur l’utilisation de miroirs pour concentrer les rayons du soleil sur un récepteur, où un fluide caloporteur est chauffé à haute température. Ce fluide transmet ensuite sa chaleur à un échangeur thermique qui génère de la vapeur, actionnant ainsi une turbine pour produire de l’électricité. Contrairement aux panneaux photovoltaïques, qui transforment directement la lumière du soleil en électricité, le CSP permet de stocker l’énergie thermique avant de la convertir en électricité, offrant ainsi plus de flexibilité et de fiabilité au réseau électrique.

Un potentiel de stockage d’énergie moins coûteux que les batteries

Face à la montée en puissance de l’énergie solaire photovoltaïque (PV), plus simple à installer et dont les coûts ont considérablement baissé au cours des 15 dernières années, le CSP a perdu des parts de marché. Toutefois, le CSP conserve un avantage majeur : le stockage de l’énergie thermique à moindre coût. Selon Eckhard Lüpfert, président du comité technique TC 117 de la Commission électrotechnique internationale (CEI), le coût du stockage thermique est environ 100 fois inférieur à celui des batteries lithium-ion, actuellement très utilisées pour le stockage d’énergie. Cette différence de coût constitue un atout stratégique pour le CSP, en particulier dans un contexte de demande croissante de solutions de stockage à l’échelle du réseau.

Comment fonctionne le stockage thermique dans les centrales CSP ?

Le stockage thermique repose sur l’utilisation de réservoirs isolés remplis de sels fondus, chauffés à des températures pouvant atteindre 600 °C. Ce système permet de stocker l’énergie solaire captée le jour et de la libérer la nuit ou lors des périodes de forte demande. La perte thermique est très faible, d’environ 1 °C par jour, ce qui rend possible le stockage de l’énergie sur plusieurs mois, même si, dans la pratique, il est économiquement plus rentable de consommer cette énergie quotidiennement.

Le principe est similaire au fonctionnement des centrales thermiques classiques au charbon ou au gaz, où une source de chaleur (ici le sel fondu) est utilisée pour produire de la vapeur, actionnant ensuite une turbine. Contrairement aux combustibles fossiles, les sels fondus utilisés pour le stockage thermique sont réutilisables sur plusieurs décennies, réduisant les coûts d’exploitation à long terme.

Les principaux systèmes de stockage thermique

Plusieurs configurations de stockage thermique sont utilisées dans les centrales CSP :

Système à deux réservoirs directs

Dans ce système, le fluide caloporteur utilisé pour capter la chaleur solaire est également utilisé pour le stockage thermique. Le fluide circule entre deux réservoirs : l’un à haute température et l’autre à basse température. Ce système est utilisé dans certaines centrales à capteurs cylindro-paraboliques et dans la centrale expérimentale Solar Two en Californie, où des sels fondus ont été utilisés comme fluide de stockage.

Système à deux réservoirs indirects

Ce système est similaire au précédent, mais le fluide de transfert de chaleur et le fluide de stockage sont distincts. Le fluide de transfert chauffe le fluide de stockage via un échangeur thermique. Ce système est particulièrement adapté lorsque le fluide de transfert est coûteux ou inadapté au stockage. Ce type de système est utilisé dans plusieurs centrales espagnoles, où l’huile organique est utilisée comme fluide caloporteur et le sel fondu comme fluide de stockage.

Système à réservoir unique (thermocline)

Contrairement aux systèmes à deux réservoirs, le système thermocline utilise un seul réservoir contenant un milieu solide (comme du sable de silice) et un fluide caloporteur. La chaleur est stockée dans la partie supérieure du réservoir, tandis que la partie inférieure reste à basse température. Ce système est moins coûteux que les systèmes à deux réservoirs, car il nécessite moins de matériel et d’espace. Ce type de stockage a été testé dans la centrale Solar One en Californie.

Applications industrielles du CSP

Au-delà de la production d’électricité, le CSP peut également fournir de la chaleur industrielle pour des secteurs gourmands en énergie, tels que la production de ciment, la métallurgie (fer et acier), la chimie et l’agroalimentaire. Par exemple, la production de ciment nécessite de chauffer des matières premières à environ 1 450 °C, un processus traditionnellement alimenté par des combustibles fossiles. En utilisant l’énergie solaire concentrée pour chauffer les fluides caloporteurs, il est possible de fournir la chaleur nécessaire, contribuant ainsi à la décarbonisation de l’industrie cimentière, fortement émettrice de CO2.

Normes internationales : un levier de compétitivité

Pour que le CSP devienne une option viable à l’échelle mondiale, il est essentiel de normaliser les équipements et les processus. Le comité technique TC 117 de la CEI joue un rôle fondamental dans la définition de ces normes. Depuis 2017, plusieurs normes ont été publiées pour garantir la qualité, la sécurité et la fiabilité des composants et des installations CSP. L’objectif est d’harmoniser les exigences au niveau mondial afin de réduire les coûts et de renforcer la compétitivité de cette technologie sur le marché de l’énergie.

Ces normes couvrent des aspects critiques tels que la manipulation de fluides organiques chauffés à très haute température, la sécurité des travailleurs et la protection de l’environnement autour des installations CSP. Eckhard Lüpfert souligne l’importance d’attirer des experts du secteur industriel pour participer à ces travaux de normalisation, au-delà des scientifiques et des chercheurs académiques traditionnellement impliqués.

Perspectives d’avenir pour le CSP

Avec l’objectif mondial de neutralité carbone, la demande pour des solutions de stockage d’énergie efficaces et durables est en plein essor. Le CSP, grâce à ses faibles coûts de stockage thermique, est bien positionné pour jouer un rôle majeur dans les systèmes énergétiques de demain. En combinant le CSP avec d’autres sources d’énergie renouvelable, comme le solaire photovoltaïque ou l’éolien, il devient possible d’assurer un approvisionnement continu en électricité, même en l’absence de vent ou de soleil.

Les perspectives de diversification des applications industrielles du CSP sont également prometteuses, notamment pour les processus industriels nécessitant des températures élevées. La mise en place de normes internationales permettra de renforcer la fiabilité et la sécurité de ces installations, ouvrant ainsi la voie à une adoption plus large de cette technologie sur les marchés mondiaux.

En somme, l’énergie solaire concentrée se positionne comme un acteur clé dans la transition énergétique. Son potentiel en matière de stockage d’énergie thermique, ses applications industrielles et ses coûts compétitifs par rapport aux batteries en font une solution stratégique. Avec le soutien des normes internationales, le CSP pourrait s’imposer comme une technologie indispensable pour atteindre les objectifs de neutralité carbone fixés par les gouvernements du monde entier.