Les États-Unis imposent des droits antidumping sur les cellules solaires d’Asie du Sud-Est.
Un coup dur pour les importations solaires venues d’Asie
Les États-Unis viennent d’annoncer l’application de droits antidumping sur les importations de cellules solaires cristallines provenant du Cambodge, de la Malaisie, de la Thaïlande et du Vietnam. Les nouveaux tarifs varient de 21,31 % à 271,28 % selon le pays et l’entreprise concernée. Cette mesure vise à protéger l’industrie solaire américaine, jugée menacée par des importations à bas coût, majoritairement issues de ces quatre pays d’Asie du Sud-Est.
Un contexte de protection de l’industrie solaire américaine
Ces droits antidumping font suite à une plainte déposée par l’American Alliance for Solar Manufacturing Trade Committee, qui accuse les fabricants chinois opérant depuis le Cambodge, la Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam de pratiquer le « dumping ». Cette pratique consiste à vendre des produits sur le marché américain à des prix inférieurs à ceux du marché local ou en deçà des coûts de production.
Ces mesures s’inscrivent dans une stratégie plus large des États-Unis visant à sécuriser leur chaîne d’approvisionnement en énergie propre, tout en soutenant les producteurs locaux. La décision est portée par l’administration de Joe Biden, dans le cadre d’une politique industrielle favorisant la relocalisation de la production de panneaux solaires via des incitations contenues dans l’Inflation Reduction Act.
Des taux variables selon les entreprises et les pays
Les taux de droits antidumping varient considérablement selon les entreprises et les pays d’origine. Par exemple, les cellules solaires produites par Jinko Solar sont soumises à un droit de 21,31 % lorsqu’elles proviennent de Malaisie, mais à 56,51 % lorsqu’elles sont fabriquées au Vietnam. De même, Trina Solar se voit imposer un droit de 77,85 % sur ses produits thaïlandais et de 54,46 % pour ceux en provenance du Vietnam. En revanche, les produits de Hanwha Qcells fabriqués en Malaisie ne se voient appliquer aucune taxe.
Ces variations s’expliquent par le degré de coopération des entreprises avec le Département du Commerce des États-Unis (DoC) et par les conclusions des enquêtes sur les pratiques de dumping.
Des décisions finales attendues en 2025
Pour l’heure, les droits antidumping annoncés ne sont que des décisions préliminaires. Le calendrier prévoit une décision finale du Département du Commerce pour le 18 avril 2025, suivie d’une validation par la Commission du commerce international des États-Unis le 2 juin 2025. Les ordonnances définitives devraient être publiées à partir du 9 juin 2025. Jusqu’à cette date, les entreprises concernées ont la possibilité de contester les mesures imposées.
Impact sur le marché solaire américain
Cette décision pourrait avoir des conséquences majeures sur le marché solaire américain. Actuellement, 80 % des panneaux solaires installés aux États-Unis sont importés, principalement des quatre pays visés par ces mesures. En conséquence, les prix des panneaux solaires pourraient augmenter, retardant certains projets d’énergie solaire, en particulier ceux des développeurs de projets photovoltaïques de grande envergure.
En parallèle, ces mesures visent à renforcer la compétitivité de la filière nationale. L’administration Biden espère inciter les fabricants à produire localement, d’autant plus que l’Inflation Reduction Act prévoit des subventions importantes pour les producteurs nationaux d’équipements d’énergie propre. Ce soutien pourrait encourager la construction de nouvelles usines de panneaux solaires sur le sol américain, comme l’a déjà annoncé l’entreprise First Solar, basée en Arizona.
Le cas de l’Inde : des mesures similaires sur le verre solaire
Les États-Unis ne sont pas les seuls à adopter des mesures de protection de leur industrie solaire. En Inde, le ministère des Finances a récemment imposé des droits antidumping sur le verre texturé trempé, un composant essentiel des panneaux solaires, importé de Chine et du Vietnam. Ces droits, appliqués pour une période de six mois à partir du 4 décembre 2024, varient de 531 à 637 euros par tonne, selon les entreprises et l’origine des importations.
La décision indienne fait suite à une enquête de la Direction générale des recours commerciaux (DGTR) après une plainte déposée par Borosil Renewables, l’un des principaux producteurs de verre solaire en Inde. L’enquête a révélé que le verre importé de Chine et du Vietnam représentait 98 % des importations totales de verre solaire en Inde et que les prix de ces importations étaient inférieurs au coût de production du verre local, affectant les marges des producteurs nationaux.
Vers une fragmentation du marché mondial de l’énergie solaire ?
Ces décisions américaines et indiennes pourraient signaler une fragmentation croissante du marché mondial des équipements solaires. La montée en puissance des droits de douane et des incitations à la production nationale reflète une volonté stratégique de réduire la dépendance vis-à-vis des chaînes d’approvisionnement mondiales, notamment celles dominées par la Chine.
Ces barrières commerciales risquent de freiner la diffusion mondiale des panneaux solaires à bas coût, au moment où la transition énergétique nécessite des installations massives d’énergie solaire pour atteindre les objectifs climatiques internationaux. Cependant, elles pourraient aussi favoriser la relocalisation de la production de composants solaires dans des zones stratégiques, renforçant la souveraineté énergétique de certains pays.