Nuward, la France vise le leadership européen dans les SMR pour 2030

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La France vise le leadership européen dans les SMR pour 2030
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La France accélère son engagement dans les petits réacteurs modulaires avec le projet Nuward, qui vise à devenir le leader européen des SMR dès 2030. Parallèlement, la start-up Calogena signe une lettre d’intention pour implanter son réacteur CAL30 au centre CEA de Cadarache, marquant une étape clé pour la décarbonation des réseaux de chaleur urbains. Ces avancées illustrent la diversification de l’offre française en matière d’énergie nucléaire modulaire.

À retenir

  • Le projet Nuward est en phase d’avant-projet détaillé depuis mars 2023, avec une demande d’autorisation de création prévue en 2025.
  • Cadarache, dans les Bouches-du-Rhône, joue un rôle central pour les études de sûreté des SMR français.
  • Le réacteur CAL30 de Calogena produit 30 MWth pour les réseaux de chaleur, avec une homologation en instruction depuis novembre 2024.
  • La Commission européenne a approuvé 300 millions d’euros d’aide pour Nuward en avril 2024.
  • Objectif commun : fournir une énergie décarbonée compétitive pour remplacer les énergies fossiles en Europe.

Dans un contexte de transition énergétique urgente, les petits réacteurs modulaires représentent une réponse pragmatique à la demande croissante d’énergie bas-carbone fiable et abordable. Ces technologies, comme Nuward et CAL30, visent à diversifier les usages nucléaires, de la production d’électricité à la chaleur urbaine, en s’appuyant sur l’expertise française accumulée. Leur développement, soutenu par l’État et l’Europe, est crucial pour la France et ses voisins, confrontés à la réduction des émissions de CO2 et à la compétitivité industrielle. À Cadarache, pôle d’innovation du CEA, ces projets concrétisent une stratégie nationale ambitieuse, tout en posant des défis techniques et réglementaires à surmonter pour une maturité industrielle rapide.

Nuward : le principal espoir français des SMR

Le projet Nuward, abréviation de « nuclear forward », incarne l’ambition française de dominer le marché européen des petits réacteurs modulaires.

Chronologie et partenariats industriels de Nuward

Le consortium Nuward a été lancé en 2019 sous l’égide d’EDF, avec des partenaires initiaux tels que le CEA, TechnicAtome, Naval Group, Framatome et Edvance. Tractebel a rejoint plus tard le groupe. Depuis mars 2023, le projet entre dans la phase d’avant-projet détaillé, ou Basic Design. Le Dossier d’Options de Sûreté (DOS) a été soumis à l’ASN en juillet 2023.

La Demande d’Autorisation de Création (DAC) est attendue pour 2025. L’objectif est de démarrer la construction d’une centrale de référence en France en 2030, un calendrier ambitieux aligné sur les attentes européennes pour 2031-2034. Ce rythme est dicté par la concurrence internationale dans les SMR.

En termes de financement, la Commission européenne a validé en avril 2024 une subvention française de 300 millions d’euros. Le président de la République avait annoncé en 2022 un soutien supplémentaire de 500 millions d’euros, issu du plan France 2030.

Caractéristiques techniques et évolution du design

La version révisée du design, adoptée en juillet 2024, propose un Réacteur à Eau Pressurisée (REP) de 400 MWe pour l’électricité, couplé à 100 MWth pour la chaleur en cogénération. Ce réacteur est conçu pour une production compétitive, avec un coût estimé entre 80 et 100 euros par MWh pour l’électricité et 30 à 50 euros par MWh pour la chaleur.

Le système repose sur un refroidissement passif, immergeant le réacteur dans un bassin de 25 mètres de côté. Cela améliore la sécurité en cas d’accident, sans besoin d’intervention active. Cependant, le rendement thermique de 31,5 % reste inférieur aux 37 % d’un EPR classique, augmentant potentiellement les déchets de fission.

Cette évolution technique vise à adapter le SMR aux besoins variés, comme le remplacement de centrales à charbon en Europe de l’Est.

Le rôle de Cadarache dans la sûreté du mini-réacteur

Le centre CEA de Cadarache, dans les Bouches-du-Rhône, héberge des installations dédiées à l’étude de la performance du système de refroidissement passif de Nuward. Ce site, une Installation Nucléaire de Base (INB), regroupe 22 INB civiles et une pour la défense, offrant un cadre sécurisé pour les tests.

Les recherches portent sur la fiabilité du refroidissement en conditions extrêmes, essentielle pour exclure tout risque de fusion du cœur. Cadarache bénéficie d’une expertise en ingénierie nucléaire, tant civile que militaire, via des installations comme les chaufferies K15 et K22.

Ces travaux renforcent la crédibilité du projet auprès des régulateurs européens.

Illustration des SMR en France

Cadarache, pôle de développement pour les petits réacteurs modulaires thermiques

Le site de Cadarache émerge comme un hub stratégique pour les PRM, illustrant l’intégration de l’innovation nucléaire dans les infrastructures existantes.

L’actualité récente : Calogena s’installe à Cadarache

Le 27 août 2025, Calogena, filiale du groupe Gorgé, et le CEA ont signé une Lettre d’Intention (LOI) pour étudier l’implantation d’un module CAL30 à Cadarache. Cette étape vise à évaluer le raccordement au réseau de chaleur interne du centre.

Ce partenariat s’inscrit dans une dynamique plus large de décarbonation des usages thermiques. Calogena, start-up spécialisée dans les chaudières nucléaires intégrées, cible les besoins locaux près des zones urbaines.

L’accord pave la voie pour une démonstration concrète des PRM thermiques en France.

Le projet CAL30 : objectif chaleur décarbonée

Le CAL30 est un Petit Réacteur Modulaire (PRM) de 30 MWth, dédié exclusivement à la production de énergie décarbonée pour les réseaux de chaleur urbains. Alimenté à l’uranium enrichi, il réduit la dépendance aux gaz et fiouls fossiles sans générer d’électricité.

150 fois plus compact qu’un EPR, il intègre une multitude de barrières de sûreté pour prévenir tout accident majeur. Son design modulaire permet une implantation flexible, y compris en proximité des villes.

Ce réacteur répond à l’enjeu de décarboner 20 % des émissions de CO2 liées au chauffage en France.

Enjeux de sûreté et processus d’homologation

La demande d’homologation de Calogena a été déposée auprès de l’ASNR en novembre 2024. En août 2025, les options de sûreté sont en instruction, avec une pré-instruction en cours auprès de STUK en Finlande.

Les évaluations portent sur la robustesse des systèmes passifs et la gestion des déchets. Calogena met en avant l’absence de risque de fusion du cœur grâce à ses conceptions intrinsèquement sécurisées.

Ce processus réglementaire, rigoureux, assure la conformité aux standards européens.

Calogena et CEA à Cadarache

Stratégie nationale : la diversification des SMR au service de la transition énergétique

La France structure son offre en SMR pour une transition énergétique pragmatique, combinant électricité et chaleur bas-carbone.

La complémentarité des projets Nuward et Calogena

Nuward cible la production d’électricité et de cogénération, tandis que CAL30 se focalise sur la chaleur dédiée. Ensemble, ils diversifient les applications des PRM, remplaçant les centrales à charbon et décarbonant les réseaux urbains.

Cette approche multi-usages renforce la résilience énergétique face aux fluctuations renouvelables. Les coûts compétitifs des deux projets soutiennent l’économie circulaire européenne.

Les experts soulignent que cette complémentarité accélère l’adoption des SMR à l’échelle continentale.

Le rôle pivot des centres de recherche du CEA

Le CEA, via Cadarache, assure la radioprotection et les études de sûreté pour ces initiatives. Avec plus de 600 ingénieurs mobilisés chez EDF et partenaires, le focus est sur des technologies éprouvées pour une industrialisation rapide.

Ce pôle regroupe des INB exploitant des réacteurs expérimentaux, facilitant les transferts d’expertise. La création de la filiale Nuward en 2023 consolide cette mobilisation industrielle.

Les analyses indiquent que Cadarache est essentiel pour valider la durabilité et l’adaptabilité des SMR.

Enjeux industriels et compétitivité internationale

Malgré les avancées, le faible rendement de Nuward pose un contrepoint : il pourrait générer plus de produits de fission, nécessitant des optimisations pour minimiser les déchets. Les experts de l’ASN insistent sur une évaluation loyale de ces limites.

Sur le plan international, la France vise une position leader en Europe, face à la concurrence américaine et chinoise. Les financements publics catalysent des partenariats privés, assurant une compétitivité économique.

À terme, ces SMR pourraient exporter une expertise française en sécurité nucléaire et en efficacité énergétique.

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