À partir du 1ᵉʳ février 2025, les consommateurs français seront confrontés à une double évolution des tarifs d’électricité : une hausse de 7,7 % du TURPE, qui finance les réseaux électriques, et une baisse historique de 15 % des Tarifs Réglementés de Vente (TRV). Si cette baisse semble être une bonne nouvelle, elle masque une réalité plus complexe. Entre consommateurs résidentiels et entreprises, entre abonnés aux TRV et clients des fournisseurs alternatifs, qui sont réellement les gagnants et les perdants de cette évolution tarifaire ?
Hausse du TURPE : un passage obligé pour financer le réseau
Le Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricité (TURPE) est un élément essentiel de la facture d’électricité. Il représente 20 à 30 % du montant total et finance les infrastructures nécessaires à l’acheminement de l’électricité. Il se divise en deux composantes :
- Le tarif de transport (HTB), géré par RTE, qui achemine l’électricité sur de longues distances.
- Le tarif de distribution (HTA-BT), géré principalement par Enedis, qui assure la connexion jusqu’aux consommateurs finaux.
À compter du 1ᵉʳ février 2025, le TURPE augmentera de 7,7 %, avec une hausse plus marquée pour le transport (+9,6 %). Cette augmentation vise à compenser les déficits accumulés entre 2021 et 2024, estimés à 523,6 millions d’euros pour RTE et 2,341 milliards d’euros pour Enedis. Ces pertes s’expliquent par :
- Une baisse de la consommation due à la flambée des prix et aux efforts de sobriété énergétique.
- Des coûts accrus pour compenser les pertes électriques sur un marché de gros aux prix extrêmement volatils.
- Un besoin croissant d’investissements pour moderniser les infrastructures.
Baisse des TRV : un allègement temporaire
En parallèle, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a annoncé une baisse des TRV de 15 % en moyenne au 1ᵉʳ février 2025, ramenant le tarif moyen de 281,5 €/MWh TTC à 239,2 €/MWh TTC. Cette baisse est due à l’effondrement des prix du marché de gros, après des hausses records observées durant la crise énergétique.
Les réductions varieront cependant en fonction des options tarifaires :
- -14,5 % pour les contrats « base ».
- -16 % pour les options « heures pleines/heures creuses ».
- -2 % seulement pour l’option « Tempo », qui reste cependant avantageuse pour les consommateurs évitant les jours rouges.
Malgré cette baisse, certains consommateurs verront leur facture augmenter en raison de deux facteurs :
- Le retour à la normale de la TICFE (accise sur l’électricité), qui passe de 22 €/MWh à 33,7 €/MWh.
- L’augmentation du TURPE, qui compensera en partie la baisse des TRV.

Les gagnants et les perdants de cette évolution tarifaire
Les gagnants : les abonnés aux TRV sans forte dépendance aux heures creuses
Pour les 20,4 millions de ménages souscrivant aux TRV, la baisse de 15 % est une bonne nouvelle, surtout pour ceux dont la consommation est stable et qui ne sont pas fortement impactés par les variations du TURPE.
Les consommateurs avec un abonnement « base » et ceux en « heures pleines/heures creuses » bénéficieront de réductions significatives, malgré l’augmentation du TURPE.
Les perdants : les entreprises et les clients des fournisseurs alternatifs
Les entreprises, en particulier celles à forte consommation d’électricité, verront leur facture augmenter avec la hausse du TURPE. Même si certaines bénéficieront de la baisse des TRV, les coûts globaux risquent de rester élevés.
Les clients des fournisseurs alternatifs pourraient aussi être perdants. Nombre d’entre eux ont souscrit à des offres indexées sur le marché et verront une répercussion des hausses de taxes et du TURPE. Les fournisseurs devront ajuster leurs offres, ce qui pourrait brouiller la perception de la baisse annoncée des TRV.
Un équilibre fragile entre stabilité et transformation du réseau
Au-delà des hausses et baisses immédiates, la question clé reste le financement du réseau électrique. Le TURPE 7 marque une transition importante :
- Les investissements d’Enedis passeront de 4,9 milliards d’euros en 2023 à 7 milliards en 2028.
- Les dépenses de RTE atteindront 6,4 milliards d’euros d’ici 2028, contre 2,1 milliards en 2023.
Ces financements sont essentiels pour :
- Renforcer le réseau face au développement des énergies renouvelables.
- Soutenir l’essor des véhicules électriques et l’électrification des usages.
- Moderniser les infrastructures pour améliorer leur résilience.
Conclusion : un jeu à somme nulle pour les consommateurs ?
En résumé, la baisse des TRV de 15 % pourrait donner l’illusion d’un soulagement pour les consommateurs, mais la hausse du TURPE et la fin du bouclier tarifaire réduisent cet avantage. Les abonnés aux TRV bénéficieront globalement d’une facture plus légère, sauf pour ceux dépendants des offres Tempo ou des fournisseurs alternatifs. Les entreprises, elles, risquent de voir leur facture grimper, tandis que les investissements colossaux dans les infrastructures laissent entrevoir d’autres ajustements tarifaires à l’avenir.
Si les prix de l’électricité restent sous surveillance, la seule certitude est que l’évolution tarifaire n’est jamais unilatérale. Chaque consommateur devra suivre de près son contrat et adapter ses usages pour limiter l’impact des hausses à venir.