Voitures électriques en Europe face à l’échéance 2035

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L'Europe vise 2035 pour les voitures électriques sous pression
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L’Union européenne s’est fixée un objectif ambitieux : interdire la vente de voitures thermiques neuves d’ici 2035 pour accélérer la transition vers le véhicule électrique. Pourtant, en octobre 2025, les ventes de voitures électriques stagnent à 15,8 % du marché européen, loin des trajectoires nécessaires, tandis que la concurrence chinoise, dopée aux subventions, envahit le continent. Cet article explore les tensions industrielles et les angles morts de cette échéance, appelant à un pragmatisme lucide pour une transition viable.


À retenir

  • Objectif UE 2035 : 100 % des voitures neuves électriques.
  • Ventes actuelles : 15,8 % en 2025, croissance nulle en 2024.
  • Concurrence chinoise : 25 % des batteries européennes d’origine chinoise en 2024.
  • Mesures UE : Taxes jusqu’à 38 % sur importations chinoises depuis octobre 2024.
  • Crise française : Filière automobile en péril, 350 000 emplois menacés.

L’échéance 2035 sous tension

L’objectif européen de 100 % de voitures électriques en 2035 semble s’éloigner à mesure que les ventes patinent et que la filière automobile française vacille. Cette ambition, fixée par la Commission européenne, vise à réduire les émissions de CO2 et à verdir les transports, mais elle bute sur des réalités industrielles brutales. En octobre 2025, un rapport du Sénat français alerte sur une crise profonde qui pourrait mener à un effondrement si aucune mesure n’est prise.

Le défi du 100 % électrique

Pour atteindre l’interdiction des ventes de véhicules thermiques neufs en 2035, l’Union européenne table sur une accélération massive des ventes de véhicules électriques à batterie. Actuellement, ces véhicules représentent seulement 15,8 % des immatriculations dans l’UE en 2025, un chiffre en deçà des prévisions. Une croissance annuelle de 14 % serait requise pour combler l’écart, mais 2024 a enregistré un recul de 5 % en glissement annuel.

Les véhicules électriques à batterie occupaient la troisième place des motorisations en 2024, avec 13,5 % des ventes totales. Cette stagnation reflète un marché hésitant, malgré les engagements climatiques. L’enjeu est clair : sans rebond, l’objectif de 2035 risque de devenir un mirage, compromettant les réductions d’émissions attendues dans le secteur automobile.

La faiblesse des ventes et des constructeurs

Les constructeurs européens, y compris français, peinent à relancer les ventes de voitures électriques. Depuis la crise du Covid-19, ils ont opté pour une stratégie de montée en gamme, privilégiant des modèles haut de gamme au détriment des options abordables. Résultat : les ménages modestes se tournent vers des alternatives plus accessibles, freinant l’adoption massive.

En France, la filière automobile emploie 350 000 salariés directement, et jusqu’à 800 000 en aval. Le rapport du Sénat de octobre 2025 décrit cette branche comme en « crise profonde », se dirigeant « vers un crash si rien n’est fait ». Les ventes de véhicules hybrides, en hausse de 38,7 % en novembre 2024 en France, illustrent cette préférence pour des solutions intermédiaires face aux limites d’autonomie des électriques purs.

Le marché européen attire aussi les constructeurs chinois, qui voient en lui un débouché vital face au ralentissement domestique. Cette pression externe accentue les faiblesses internes, forçant l’Europe à repenser sa compétitivité.

Voitures électriques en Europe sous pression 2035

La concurrence chinoise, un raz-de-marée subventionné

La Chine émerge comme le principal défi à l’ambition électrique européenne, grâce à une politique industrielle agressive et des subventions massives qui faussent la concurrence. Depuis les années 2000, Pékin a investi des milliards pour dominer la chaîne de valeur des véhicules électriques. En 2025, cette offensive atteint l’Europe, où les importations chinoises gagnent du terrain à une vitesse alarmante.

L’effet des aides d’État chinoises

Les subventions chinoises ont propulsé l’industrie des véhicules électriques à un niveau inégalé. En 2015, l’État accordait jusqu’à 60 000 yuans par véhicule électrique vendu. Entre 2015 et 2020, le total de ces aides s’élève à environ 50,6 milliards d’euros, selon un rapport de Bloomberg.

Ces financements ont permis à BYD de dépasser Tesla en ventes mondiales de véhicules électriques dès 2022.

La concurrence chinoise est impitoyable et déloyale, dopée à outrance par les aides d’État.

Extrait du rapport du Sénat français, octobre 2025. Sans ces distorsions, le paysage concurrentiel serait bien plus équilibré pour les acteurs européens.

La domination de la chaîne d’approvisionnement

La Chine contrôle 70 % de la production mondiale de batteries lithium-ion, un composant clé des véhicules électriques. Le leader CATL détient 37 % du marché mondial en 2024 et fournit de nombreux constructeurs européens. Cette dépendance expose l’Europe à des risques géopolitiques et logistiques majeurs.

En 2024, 25 % des véhicules électriques à batterie vendus en Europe étaient fabriqués en Chine, y compris pour des marques occidentales. L’absence de ressources minières locales et d’usines de batteries complètes rend le Vieux Continent vulnérable. Les métaux critiques comme le lithium, cobalt, nickel et graphite proviennent majoritairement d’extractions en Asie ou en Afrique, amplifiant cette asymétrie.

Les deux modèles les plus vendus en Europe restent les Tesla américaines, mais la percée chinoise progresse : en juin 2025, les voitures chinoises ont franchi la barre des 10 % de parts de marché européen pour la première fois.

La percée sur le marché européen

Face à ce rouleau compresseur, les constructeurs européens perdent des parts. Les véhicules chinois offrent des prix compétitifs, souvent inférieurs de 20 à 30 % à leurs équivalents locaux. Cette attractivité commerciale menace directement la Stellantis et d’autres acteurs du ACEA, l’association des constructeurs européens.

Pour contrer cela, des partenariats émergent : Stellantis s’associe à Leapmotor chinois pour assembler des véhicules en Europe. Mais cette stratégie soulève des questions sur la souveraineté industrielle européenne à long terme.

Concurrence chinoise et marché européen des VE

L’Europe riposte avec pragmatisme

Devant cette offensive, l’Union européenne et ses États membres déploient des mesures protectionnistes et incitatives pour préserver leur industrie. Ursula von der Leyen a réaffirmé en septembre 2025 le cap vers 2035, déclarant que l’avenir des transports reste électrique quoi qu’il arrive. Ces initiatives visent à équilibrer la concurrence et à stimuler l’innovation locale.

Le maintien du cap politique par l’UE

La Commission européenne refuse de reculer sur l’interdiction des thermiques en 2035, malgré les pressions industrielles. Cette fermeté s’appuie sur les engagements climatiques du Pacte vert.

Quoi qu’il arrive, l’avenir est électrique.

Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, 12 septembre 2025. L’objectif est de réduire les émissions de CO2 du secteur automobile, responsable de 15 % des rejets européens.

En France, le bonus écologique soutient les achats de véhicules électriques, avec des aides jusqu’à 5 000 euros pour les modèles éligibles. Le rapport du Sénat propose d’étendre cela au leasing social pour toucher les classes moyennes et populaires.

Les mesures protectionnistes et incitatives

En octobre 2024, l’UE a imposé des droits de douane supplémentaires jusqu’à 38 % sur les voitures électriques chinoises importées, s’ajoutant aux 10 % existants. Ces taxes visent à protéger le marché intérieur des importations low-cost. Par ailleurs, une prime est accordée depuis le 1er octobre 2025 aux véhicules dont la batterie est produite en Europe.

Ces outils protectionnistes pourraient inverser la tendance : selon Arthur Corbin, conseiller à la Commission, deux tiers des batteries des voitures électriques vendues en Europe en 2030 pourraient être « made in Europe ». Cette ambition repose sur des investissements dans des usines comme celle de Northvolt en Suède ou Accuride en France.

L’adaptation des constructeurs et l’innovation

Les constructeurs chinois contournent les barrières : BYD ouvre une usine à Szeged en Hongrie, opérationnelle fin 2025. Côté européen, l’innovation progresse avec des batteries LFP sans cobalt, comme sur la Tesla Model 3 de base depuis 2020. Ces technologies réduisent la dépendance aux métaux rares et baissent les coûts.

Michiel Langezaal, de Fastned, voit dans la transition une opportunité :

La transition électrique est une opportunité pour repenser la mobilité de manière plus efficace et durable.

Michiel Langezaal, dirigeant de Fastned, octobre 2025. Les constructeurs s’adaptent en misant sur l’autonomie accrue, avec des modèles dépassant 400 km, adaptés aux usages quotidiens.

Angles morts de la transition électrique

Au-delà des batailles commerciales, la transition vers le véhicule électrique révèle des faiblesses structurelles en termes de coûts, d’autonomie et de bilan écologique. Ces aspects, souvent minimisés, exigent une analyse honnête pour éviter des illusions. En 2025, alors que l’échéance 2035 approche, ces angles morts soulignent la nécessité d’une approche pragmatique et sobre.

Le coût d’accès et l’accessibilité

Les voitures électriques restent plus chères à produire et à acheter que leurs versions thermiques, freinant l’adoption par les ménages modestes. Le coût d’une batterie représente la moitié des ressources totales d’un véhicule électrique. Bien que les recharges à domicile ou au travail coûtent trois fois moins qu’un plein d’essence, les tarifs sur autoroute s’avèrent plus élevés.

La demande a ralenti depuis le pic de 2020, avec une préférence pour les hybrides qui offrent une autonomie hybride sans contrainte de recharge. En France, les ventes d’hybrides ont bondi de 38,7 % en novembre 2024. Pour démocratiser l’électrique, des incitations comme le leasing social sont essentielles, comme le préconise le Sénat.

L’enjeu des matières premières et du recyclage

L’extraction des métaux critiques pour les batteries – lithium, cobalt, nickel, graphite – génère une pollution doublée ou triplée par rapport aux thermiques. L’Europe manque de mines locales, accentuant la dépendance à la Chine et à la Corée du Sud. Le recyclage des batteries usagées demeure un défi non résolu, avec des taux actuels inférieurs à 50 %.

Des avancées émergent, comme les batteries LFP qui évitent le cobalt, mais la chaîne d’approvisionnement globale reste fragile. Sans progrès en recyclage, la transition risque d’alourdir l’empreinte environnementale à long terme.

Le vrai bilan environnemental et énergétique

La production d’un véhicule électrique émet deux fois plus de gaz à effet de serre qu’un thermique, principalement due à la batterie. Le bilan final dépend du mix énergétique : en France, dominé par le nucléaire, il est favorable ; ailleurs, avec du charbon, il l’est moins. L’autonomie des modèles modernes, souvent supérieure à 400 km, répond aux besoins quotidiens, mais les longs trajets posent encore question.

Cette controverse révèle les limites d’une transition hâtive : privilégier l’efficacité et la sobriété plutôt qu’une électrification à tout prix. Les consommateurs optent pour des solutions hybrides adaptées à leurs usages réels, indiquant que la flexibilité prime sur l’idéologie pure.

Cette échéance de 2035 met en lumière les tensions entre ambition climatique et réalités économiques. Elle appelle à une lucidité sur les coûts cachés et à des actions ciblées pour une transition durable, sans sacrifier l’industrie européenne ni ignorer les besoins des usagers.

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