Le marché des véhicules électriques (VE) est en pleine mutation, entre avancées technologiques, pressions économiques et tensions géopolitiques. Trois grands acteurs de l’industrie automobile, BYD, Tesla et Toyota, se démarquent par leurs stratégies contrastées face à ces défis. Entre conquête agressive de nouveaux marchés, difficultés à convertir les intentions d’achat en ventes concrètes et préoccupations sur l’impact social de l’électrification, l’industrie est en pleine effervescence.
BYD face aux barrières tarifaires en Europe
Le géant chinois des VE BYD ne recule devant rien pour s’imposer en Europe, malgré l’introduction imminente de tarifs douaniers visant à limiter l’influence des constructeurs chinois sur le marché local. À partir d’un prix initial de 25 000 à 30 000 euros, BYD prévoit de lancer des modèles compétitifs en Allemagne, moteur de l’industrie automobile européenne, tout en projetant d’ouvrir des usines en Hongrie (2025) et en Turquie (2026) pour contourner les coûts liés aux importations.
Stella Li, présidente de BYD, souligne que la rapide adoption des VE en Chine est due à un engagement fort envers l’électrification. Elle critique les politiques protectionnistes, qu’elle accuse de freiner l’adoption des VE en Europe. « En ne s’adaptant pas rapidement à l’électrification, les constructeurs traditionnels risquent de ne pas survivre », avertit-elle, appelant les industriels à une vision à long terme.
Tesla : entre succès et désillusion
Malgré son statut de pionnier, Tesla rencontre des défis avec son Cybertruck. Le carnet de précommandes massif, alimenté par des dépôts de 100 $ chacun, semble s’épuiser rapidement. La configuration actuelle, avec un prix de départ de 79 990 $, limite l’accès au modèle, qui a vu son prix augmenter significativement par rapport à l’annonce initiale de 40 000 $.
Les critiques s’intensifient autour des performances techniques révisées : autonomie réduite à 470 miles avec un prolongateur d’autonomie coûteux de 16 000 $, capacités de remorquage et de charge utiles abaissées. Malgré ces difficultés, le Cybertruck s’est classé troisième des ventes de VE au troisième trimestre 2024 aux États-Unis, mais les conversions de précommandes en ventes réelles restent un défi. Beaucoup de clients potentiels attendent des configurations plus abordables avant de s’engager.
Toyota alerte sur les risques d’une transition 100% électrique
Contrairement à BYD et Tesla, Toyota défend une stratégie multi-énergies combinant hybrides, électriques à batterie, combustibles fossiles et piles à hydrogène. Akio Toyoda, président de Toyota, met en garde contre une transition exclusivement orientée vers les VE, qu’il considère comme une menace pour l’emploi dans l’industrie automobile japonaise.
Avec 5,5 millions d’emplois liés à l’industrie automobile au Japon, dont beaucoup dans la fabrication de moteurs thermiques, une transition radicale pourrait provoquer des pertes massives d’emplois. Toyoda plaide pour une diversification des technologies afin de préserver les emplois tout en progressant vers la neutralité carbone.
Des études, comme celle de Volkswagen en 2020, corroborent ces inquiétudes, révélant que les VE nécessitent moins de main-d’œuvre pour la production de chaînes de transmission. Toutefois, Toyota estime que les VE représenteront environ 30 % du marché mondial, laissant la place à d’autres technologies pour maintenir un équilibre dans l’emploi.
Un secteur à un carrefour stratégique
Les exemples de BYD, Tesla et Toyota illustrent les stratégies divergentes face aux défis de l’électrification. Alors que BYD mise sur une expansion rapide malgré les obstacles réglementaires, Tesla doit relever le défi de répondre aux attentes élevées des consommateurs. De son côté, Toyota prône une approche pragmatique pour assurer une transition durable et socialement responsable.
Cette période charnière pose des questions cruciales pour l’avenir de l’industrie : comment équilibrer innovation, compétitivité et responsabilité sociale ? Les réponses à ces défis détermineront la trajectoire du marché automobile mondial dans les années à venir.