Porsche, fleuron de l’automobile premium, a annoncé en avril 2025 l’abandon de son projet ambitieux de production de batteries haute performance via sa filiale Cellforce Group. Ce revirement transforme le site de Kirchentellinsfurt, près de Stuttgart, en un centre dédié à la recherche et développement, reléguant aux oubliettes les plans d’industrialisation. Cette décision s’inscrit dans un contexte de défis économiques pour la transition électrique en Europe.
À retenir
- Cellforce Group, créée en 2022, abandonne sa production de cellules de batteries pour se recentrer sur la R&D.
- Environ 200 salariés sur 286 seront licenciés, soit 70 % des effectifs.
- Investissement initial de 295 millions d’euros jugé non viable économiquement.
- Ventes de véhicules électriques décevantes aux USA et en Chine, malgré un succès en Europe.
- Porsche rééquilibre ses investissements entre motorisations électriques et thermiques.
- Opportunités de reclassement chez PowerCo ou V4Smart au sein du groupe Volkswagen.
Ce revirement de Porsche illustre les tensions palpables dans la course à l’électrification des flottes automobiles européennes. Alors que la transition énergétique vers le véhicule électrique promet durabilité et réduction des émissions de CO2, les réalités économiques freinent les ambitions industrielles. Pour les acteurs du secteur premium comme Porsche, ce choix stratégique questionne la capacité de l’Europe à rivaliser avec la concurrence asiatique, tout en impactant directement les emplois et les innovations locales. L’enjeu est majeur : comment concilier sobriété énergétique et compétitivité sans sacrifier la souveraineté technologique ?
Le revirement stratégique de Cellforce : de l’ambition industrielle à la R&D
La filiale Cellforce Group, lancée en 2022 par Porsche et son partenaire Sonstige, visait initialement à doter les sportives électrifiées de cellules de batteries sur mesure. Ce projet incarnait l’engagement de la marque dans la transition électrique, avec des objectifs de production ambitieux. Pourtant, en avril 2025, Oliver Blume, PDG de Porsche, a officialisé l’arrêt des plans d’expansion industrielle.
L’abandon du projet de production de masse
Le site de Kirchentellinsfurt, près de Stuttgart, devait atteindre une capacité de 1 GWh initialement, avec une extension prévue à 20 GWh. Ces cellules haute performance étaient destinées à des modèles comme le Taycan, renforçant l’autonomie et la performance des véhicules électriques premium. L’ambition industrielle s’est heurtée à des obstacles imprévus, forçant Porsche à repenser sa stratégie.
La décision marque un tournant pour la division, qui avait été présentée comme un pilier de l’électromobilité chez le constructeur. Oliver Blume a expliqué que,
pour des raisons de volume et d’économies d’échelle, Porsche ne produit plus ses propres cellules de batterie
, tout en soulignant que l’électromobilité reste une technologie essentielle. Ce choix reflète une adaptation pragmatique aux contraintes du marché automobile.
Restructuration vers un pôle de recherche et développement
Désormais, le site se concentrera sur la R&D, explorant des innovations en batteries sans les coûts d’une production à grande échelle. Cette pivot s’aligne sur la nécessité de maintenir un avantage technologique pour les véhicules électriques de Porsche. Les recherches porteront sur des solutions adaptées aux besoins spécifiques de la marque premium.
Ce recentrage permet une plus grande flexibilité face aux évolutions rapides du secteur. Contrairement à une usine de production, un centre R&D limite les investissements fixes et favorise les partenariats. Pour la transition énergétique, cela souligne l’importance d’une approche modulaire en innovation.

Conséquences sociales et analyses des facteurs d’échec
L’annonce de l’abandon de Cellforce n’est pas sans répercussions humaines et économiques, révélant les failles d’une ambition européenne dans l’industrie des batteries. Au-delà des emplois menacés, ce cas met en lumière les défis structurels de la concurrence mondiale. Porsche, filiale du groupe Volkswagen, illustre ainsi les ajustements forcés dans la stratégie globale de l’automobile.
Les licenciements massifs et les mesures d’atténuation
En août 2025, une réunion avec les employés a confirmé un licenciement collectif de 200 salariés sur un effectif de 286, soit environ 70 %. Der Spiegel et l’agence pour l’emploi ont relayé cette information, notifiée aux autorités. Le syndicat IG Metall, par la voix de son porte-parole Kai Lamparter, a dénoncé l’ampleur de ces suppressions de postes.
Porsche s’engage à une gestion socialement responsable, avec des opportunités de reclassement chez PowerCo, le centre de compétences batteries du groupe Volkswagen, ou V4Smart, une unité acquise auprès de Varta. Ces transferts visent à atténuer l’impact sur les familles et la région de Stuttgart. Kai Lamparter a toutefois exprimé des inquiétudes sur le sort des travailleurs qualifiés dans ce secteur en mutation.
Les coûts prohibitifs et le ralentissement du marché
L’unité de production requérait un investissement de 295 millions d’euros, un montant jugé irréaliste par la direction en raison de surcoûts liés à des machines européennes onéreuses et des retards techniques. Le modèle économique s’est révélé non viable, avec des coûts de développement explosant les prévisions. Ces éléments ont précipité l’abandon, soulignant les limites des économies d’échelle pour un acteur comme Porsche.
Sur les marchés clés, les ventes de véhicules électriques ont déçu : aux USA et en Chine, elles sont restées inférieures aux attentes, face à une concurrence féroce de géants comme CATL ou BYD. En Chine, les clients optent pour des marques locales abordables comme Xiaomi. Paradoxalement, en Europe, les ventes de véhicules électrifiés ont dépassé les objectifs, atteignant 57 % des livraisons au premier semestre 2025, un contrepoint qui questionne la focalisation sur les exportations.
La baisse des bénéfices de Porsche au deuxième trimestre 2025, à 91 %, a accéléré ces ajustements. Ce contexte renforce les enjeux pour l’industrie automobile européenne, confrontée à une transition électrique inégale. Malgré ces échecs, l’adaptabilité reste clé pour préserver la durabilité du secteur.

Impact sur la stratégie produit de Porsche
Ce revirement n’affecte pas seulement Cellforce ; il redessine les priorités de Porsche AG en termes de motorisations. Après des mesures d’économies antérieures, comme 1 900 suppressions de postes en février 2025, la marque rééquilibre ses investissements. L’électrique perd du terrain au profit du thermique dans certains segments.
Le rééquilibrage entre électrique et thermique
Porsche envisage une version thermique du Macan pour certains marchés, contredisant l’objectif initial d’électrification totale. Les modèles Cayenne et Panamera resteront disponibles en essence jusqu’à la fin des années 2030. Cette flexibilité répond à une demande persistante pour les motorisations thermiques, même dans un contexte de transition.
Le cadre de la réduction des coûts globaux
En juillet 2025, un avertissement interne a signalé que le modèle économique actuel ne fonctionne plus face à la concurrence. L’abandon de Cellforce s’inscrit dans cette vague de restrictions, priorisant la rentabilité sur l’expansion électrique. Pour l’Europe, cela pose la question d’une transition plus pragmatique, équilibrant innovation et réalités économiques.










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